Dans une offre valable jusqu’au 31 juillet prochain, que s’est procurée notre confère LSA, le groupe Fnac Darty a chiffré son offre de reprise en plan de cession de l’enseigne de jeux et jouets, et défini les contours de sa stratégie de relance.
Avec un chiffre d’affaires de 7,45 milliards d’€ en 2017 (+ 0,4 % vs 2016), un résultat opérationnel courant de 270 M€ (+ 33 %), un résultat net de 125 M€ (100 M€ de plus qu’en 2016) et près de 25.000 collaborateurs, le groupe Fnac Darty se présente comme le leader européen de la distribution omni-canal, le leader de la distribution en France de produits techniques et un acteur incontournable de la distribution de produits éditoriaux (premier libraire de France, notamment, avec plus de 46 millions de livres vendus l’année passée).
En synthèse, le repreneur présente un plan d’investissement qualifié de « très ambitieux » reposant sur « la reprise de plusieurs marques, dont La Grande Récré, ainsi qu’un grand nombre de magasins et de services centraux afin de permettre le développement d’une activité réellement pérenne, et de garantir le maintien d’un maximum d’emplois ». Dans cette optique, Fnac Darty a développé un projet stratégique reposant sur cinq piliers :
* La rationalisation et la rénovation du parc de magasins d’ici 2022,
* La restauration de la compétitivité des prix face à l’agressivité des acteurs du e-commerce,
* Le développement de l’empreinte omni-canal de l’activité (en particulier des capacités e-commerce et logistiques) en s’appuyant sur son savoir-faire éprouvé en la matière (près de 20 millions de visiteurs uniques cumulés en moyenne par mois sur les sites Fnac Darty),
* L’enrichissement de l’offre produit avec des produits complémentaires distribués par Fnac Darty, de nouvelles catégories de produits (gaming, livres…) et le développement des marques propres ; ainsi que des shop-in-shop La Grande Récré dans les magasins Fnac,
* La capitalisation sur les actifs existants du groupe en termes de maillage territorial et de portefeuille clients.
Un plan de digitalisation pour La Grande Récré
Déposée le 15 juin dernier, l’offre prévoit la reprise de 106 magasins et de 838 salariés, soit la totalité des 726 contrats de travail attachés aux points de vente repris auxquels s’ajoutent 112 contrats de travail attachés au siège du groupe Ludendo. Parallèlement, le repreneur chiffre le montant du plan de redressement nécessaire à près de 115 M€ (financement du besoin en fonds de roulement et des pertes d’exploitation, investissements…).
En plus de ses difficultés conjoncturelles rencontrées ces dernières années – raccourcissement des délais de paiement, concurrence accrue, montée en puissance du digital… –, Fnac Darty estime que La Grande Récré souffre surtout, depuis longtemps et de manière structurelle, de plusieurs maux comme une image prix dégradée (indice 115 vs 100 pour les acteurs spécialisés et 130 vs 100 pour les pure players), une très faible empreinte multicanal puisque l’enseigne réalise seulement 3 % de ses ventes sur le Web, un concept de magasins vieillissant avec une offre peu lisible et faiblement digitalisée, un manque de compétence sur des secteurs clés comme le digital et la logistique, et une dé-crédibilisation de la stratégie auprès des partenaires de l’entreprise.
Il n’en reste pas moins que le marché du jouet reste attractif pour Fnac Darty du fait de sa résilience, de son caractère omni-canal (28 % des ventes online), de sa cible familiale et d’un positionnement avéré depuis 2011 au travers des espaces Fnac Kids en magasin et des ventes en ligne. Le groupe a ainsi réalisé un chiffre d’affaires de 48 M€ sur le jouet en 2017, soit une part de marché de 1,7 % en hausse de 19 % par rapport à 2016 (source : NPD panel Consommateur). La reprise de La Grande Récré permettrait à Fnac Darty d’acquérir une troisième marque à forte notoriété qui conforterait sa position de leader européen dans la distribution omni-canal. Offre produits, CRM et système de click & collect seraient ainsi mutualisés entre les trois enseignes.
Une offre avancée pour Toys « R » Us ?
Fort de sa capitalisation boursière de l’ordre de 2,4 milliards d’€ et d’une ligne de crédit confirmée et non tirée d’un montant de 400 M€, le groupe Fnac Darty a donc proposé 16 M€ pour l’enseigne de jouet actuellement en procédure de redressement judiciaire, ventilés comme suit : 8 M€ pour les marques « La Grande Récré », près de 7 M€ pour les autres actifs incorporels et 1 M€ pour le rachat des stocks... Un montant très faible pour ces derniers, justifié par leur faible rotation. Du côté du compte d’exploitation prévisionnel, le repreneur prévoit un chiffre d’affaires de 244,4 M€ en 2019, avant un retour aux bénéfices en 2021 où le CA devrait atteindre les 386 M€ pour un résultat net de 8,7 M€.
L’offre de Fnac Darty fait face à l’annonce faite par Jean-Michel Grunberg, président-directeur général de Ludendo, du dépôt d’un plan de continuation recentré sur l’enseigne La Grande Récré et sur le marché français, qualifié de « réaliste et autofinancé », autour des 104 magasins intégrés les plus performants du réseau auxquels s’ajoutent les 88 points de vente franchisés. Cette restructuration, qui touche autant les magasins que les équipes du siège, devrait permettre à l’enseigne de retrouver mécaniquement sa rentabilité ; sachant que les mesures déjà engagées depuis 2017 ont permis de dégager 10 M€ d’économie sur les frais de structure du groupe. De quoi retrouver la confiance des fournisseurs ? Selon Jean-Michel Grunberg, la moitié de la dette fournisseur serait épurée sur 2018, le reste étant étalé sur neuf ans... De plus, le groupe a engagé une réflexion sur un nouveau concept de magasin plus « aéré », avec une offre davantage mise en valeur et mieux positionnée en prix disposant d’un relais digital pour compléter l’offre.
Epilogue avant la fin du mois (et peut-être avant la parution de cet article !). De son côté, le journal « Le Monde » a avancé le nom du groupe Orchestra, spécialiste de la mode enfantine et de la puériculture, pour la reprise de Toys « R » Us France… Fnac Darty, Orchestra : le jouet quitterait ainsi son « autarcie » pour intégrer des groupes de distribution disposant des moyens indispensables – en termes de finance et de compétence, notamment – pour faire face à un contexte concurrentiel de plus en plus tendu.